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Lionel Lamb

Lionel Lamb
Messages : 90
Date d'inscription : 07/11/2016
Localisation : Je dois squatter le café de la prison, là.

Dossiers privés
Âge du personnage: 43 piges.
Taille: 1m82
A savoir:





Lionel Lamb
Inspecteur Crétin
Lun 7 Nov 2016 - 22:05

image

Lionel Lamb

J'ai trop de poils pour être joli



Âge: 43 ans.
Nationalité: Amerloque pure souche.
État-civil: La dernière à m'avoir mis la bague au doigt a fini en dépression.
Rumeur(s) à votre sujet: (laissez vide, un admin le remplira)

Métier : Inspecteur de police.
Lien(s) avec la prison ? J'y ai enfermé un connard de trou du cul trop bien gominé pour être honnête.

Caractéristiques physiques


Taille: 1m82.
Poids: 88kg.
Corpulence: Musclé.
Cheveux: Châtains foncés/Bruns.
Yeux: Noirs.
Modifications corporelles: Mes poils sont cent pour cent naturels.

Il fallait bien un vilain petit canard, et c'est tombé sur moi.
Contrairement à mon petit frère, j'ai jamais été le beau gosse sur lequel les nanas mouillent leurs culottes. Je suis plus du genre « non, mais on, va rester ami, hein ? », celui qu'on oublie jusqu'à ce que le superbe plan cul du vendredi soir pose un lapin, et que plutôt que de rester seule à bouffer de la glace, bah on appelle le Plan Z. Le plan Z, c'est le gars pas trop moche, mais pas trop beau non plus ; il a une tête rigolote, mais sans plus. C'est pas le super Whopper du Burger King, mais le Cheese du Macdo à un balle, voilà ; ça, c'est moi. Donc, je suis pas le bégé quoi.

Je ne suis pas si grand, je suis même un peu trapu. J'ai des épaules larges, des mains puissantes, les jambes arquées, et j'ai un souci avec les chemises ; elles seront toujours dans un état pas possible avec moi, comme si elles se froissaient à ma vue, en hurlant « Non, Lionel, tu vas recommencer à me souiller de ketchup et de pizza », quand c'est pas d'autres choses. Même chose avec les cravates, je suis obligé d'en porter, mais elles seront jamais très lisses, un peu lâches autour de mon cou, comme si je les avais mises à la dernière minute. C'est généralement le cas, c'est pas moi qui me réveille en retard, c'est l'heure qui avance trop vite. J'ai donc tendance à enfiler mes fringues de la veille, avant de filer au boulot, le tout en me brossant les dents et en avalant mon café.

Bon... sinon ? Bah comme je le disais, je suis le Cheeseburger du Macdo, j'ai une belle photo, mais en vrai, je suis pas si ragoûtant que ça. J'ai la mâchoire carrée, le nez un peu en patate, les arcades sourcilières prononcées, qui rendent mon regard un peu rude. J'ai les cheveux foncés, partant un peu n'importe comment, parce que le peigne, c'est un truc qui me fait peur, tu vois ? Je me brosse les cheveux aux doigts, et ils ont tendance à partir en virgule sur les pointes. J'ai une barbe de trois jours, qui se transforment en celle du père Noël si je ne me rase pas souvent, mal entretenue. J'ai pas trop le temps à perdre à vouloir rattraper un physique qui ne sera jamais celui de George Clooney, alors je vis avec.

Surtout passé quarante ans.

Je préfère penser qu'à défaut d'être un beau mec, je suis charismatique. Bouffer comme un porc des pizzas devant sa télé ou son ordi, ça fait mon charme, vous voyez ? J'ai du muscle, un peu de ventre, mais c'est la bière, hein. Sinon, comme je suis un mâle, j'ai des trucs de mâles. J'ai une magnifique toison sur le torse et le dos, ainsi que les bras, et les jambes ; on m'a remarqué pour le casting des loups-garous de Twilight pour faire le modèle 3D, mais comme les gamines prépubères, ce n'est pas trop mon truc, j'ai refusé. Je tiens plus du loup à la silhouette tordue dans tous les sens, à la fourrure épaisse, aux dents acérées qu'à l'inspecteur de police propre sur lui, qui sortirait tout droit de la série Hannibal. Il m'arrive de porter des lunettes, j'ai les yeux fatigués, un peu gonflés quand j'enchaîne les nuits blanches, et j'ai tendance à avoir des auréoles sous les bras.

Et dire que je suis censé partager les mêmes gênes que mon frère... à croire que le facteur a posté sa lettre trop vite dans la boîte aux lettres de ma mère.


Dossier psychologique


Défauts et qualités: Vous n'avez jamais vu quelqu'un d'aussi borné. Cynique, rancunier, râleur, colérique, désinvolte, avec un humour gras et merdique. Ne cherchez pas, vous aurez toujours tord avec moi, parce que. Bouffer salement, et comme quatre. Selon mon ex, je suis un grand gamin immature. Sinon, je suis sois-disant expressif, et spontané. Tellement expressif que les gens parient sur la gueule que je vais tirer. Je suis un vraie tue-l'amour sur patte. Et néligeant. Au fond, je suis sincère.
Tocs et manies: Renifler, et s'essuyer le nez avec sa manche. Fumer, passer ses mains dans les cheveux en les graissant, jouer avec les boutons de chemises, dormir avec ses chaussettes.  Jouer avec Touille-touille, tu sais, les trucs avec le café là.
Peurs/phobies: J'ai peur des mecs gominés, ils veulent voler mon sébum.

Quand j'ai une idée en tête, il est impossible de me la faire sortir. D'après mon ex, je suis un connard borné et rancunier ; je trouve ça un peu trop réducteur. Au fond, je suis peut-être obsédé par la même chose depuis des années, mais j'ai le mérite d'avoir une détermination à toute épreuve. Il en faut dans mon métier. Les gars comme moi, on n’en trouve pas à la pelle ; je suis loin d'être unique, mais toujours selon mon ex, j'ai une volonté à soulever des montagnes. Et c'est ça qui est rare. J'ai un avis sur tout, mais ça ne fait pas de moi pour autant un idiot qui refuse d'ouvrir les yeux par principe. Parce que les principes et moi, c'est une mauvaise relation de longue date : on se tolère, on a appris à se tolérer, plutôt. Je pense avoir un sens de la justice particulier, et j'ai été longtemps trop sentimental pour accepter de le remettre en question. Ouais, voilà, j'ai jamais tord de base, pourquoi devrais-je me remette en question quand je sais que j'ai raison ? Quoi ? Je suis fermé d'esprit ?

Non. Je suis même plutôt ouvert, c'est juste que j'ai la langue bien pendue, et je n'hésite pas à l'utiliser pour fouetter là où ça fait mal. J'ai l'air vulgaire, stupide, un peu bouffon, mais j'ai un esprit aiguisé. J'ouvre juste ma gueule un peu trop souvent, et la plupart du temps pour dire n'importe quoi. Je ne suis pas très mature pour mon âge, et mon passe-temps préféré est de forcer les gens à sortir de leurs gonds. Tu vois ce mec trop propre pour être honnête ? Là, si, il est en train de lire son putain de journal dans le parc ? Mon super instinct d'enquêteur me dit que c'est un salopard qui a l'habitude de sourire aux mamans à la sortie des écoles, tout en volant et culbutant leurs enfants, hein. Ce genre de types, moi, ça me donne envie de lécher toute ma main et la lui écraser sur la joue. Juste pour le plaisir de faire chier. Et parce que les gens comme ça, je ne les aime pas. C'est d'instinct.

Je suis d'un naturel bordélique, mon appartement n'est jamais rangé, et la dernière fois que ça a dû arriver, c'est quand mon ex est venu reprendre ses cartons. J'ai l'air indifférent sur pas mal de choses, comme le malheur ; quand ça m'est tombé dessus, j'ai fait qu'accepter, et je me suis relevé. Insensible ? Quelque part, oui, mais est-ce que ça fait de moi un connard ? Je ne pense pas. Si ça ne me touche pas, est-ce que c'est de ma faute ? Non. Quand mon ex m'a largué, parce que j'étais sois-disant trop con pour accepter que je me trompais, j'ai haussé les épaules. J'y étais attaché en plus, à mon ex, autant que je l'étais pour ma vieille console de jeux vidéos traînant dans le salon. Si elle casse, tant pis, j'aurais passé du bon temps avec, et c'est tant mieux ?

J'ai tendance à dire plus de conneries que de vérités, ce n'est pas une façade cherchant à cacher ce pauvre Lionel triste, non, je prends du plaisir à faire le con et à dire des vulgarités. Dans ce sens, j'aime provoquer. J'ai un humour corrosif, et je sais rire de tout. Et ce n'est pas ma faute si les gens n'arrivent pas à voir que c'est de l'humour, même si j'ai l'air d'être le plus sérieux du monde quand je dis que la place de la femme, c'est dans la cuisine.


Santé


Etat de santé générale: Je boîte un peu.
Allergies ou addictions: Cigarettes... et je suis un ancien alcoolique.
Soins réguliers (traitements): La branlette, quoi ? C'est pas sérieux de répondre ça dans un doc' offciel ? Mais roh.

Histoire



Pffffff... mais comment il fait ?
C'était toujours ça le plus chiant avec lui, sans effort, il les avait toutes pour lui ! Moi, j'avais dix-sept ans, et je galérais à mort pour ne serait-ce que parler à une fille. Je n'étais pas spécialement timide, mais je n'étais pas l'adolescent le plus beau du lycée. J'étais connu pour être son grand frère, et si les nanas venaient me parler, c'était dans le seul but que je les aide à aborder mon frangin. Je poussai un soupir déprimé en claquant la porte de mon casier, ronchonnant, les yeux rivés sur lui. La vie était injuste. J'étais l'aîné, mais je n'avais pas cette allure mature ; j'étais l'aîné, et pourtant, j'étais toujours derrière lui. D'un côté, ça me blasait, mais de l'autre, ça m'amusait.
« Tu es tellement intelligent aussi, tu vas faire quoi comme étude ?
— Je voudrais devenir professeur de littérature.
— Han... il est vrai que l'on te voit toujours en train de lire, dis, tu me récites un poème ? »
Je levai les yeux au ciel, en marmonnant dans ma barbe naissante. J'étais en train d'imiter les coqueluches agglutinées autour de mon petit frère, lorsque ce dernier m'envoya un coup d'oeil moqueur. Il haussa les sourcils, et je grimaçai davantage. J'eus le réflexe de me retourner, quand elles virent qui il regardait.
« Lionel est un peu bizarre.
— Mais non, il est trop franc, c'est tout.
— Toi aussi, mais tu n'as pas cette dégaine de clochard. »
Non mais l'autre ! Je m'arrêtai, en sentant le sang affluer dans mes oreilles, et finalement, je me dirigeai vers mon groupe d'amis. Les autres bizarres du lycée, mais si... vous savez de quoi je parle, ceux qui lisent des comics et apprennent à coder sur Linux, bah voilà, c'était ça, mon groupe d'amis. Je grattai un bouton d'acné sur ma mâchoire, me demandant comment je pouvais faire pour avoir ça et de la barbe, les hormones, tout ça quoi. Je jetai un dernier coup d'oeil à mon frère, en songeant que j'aurais aimé vivre dans sa peau une journée. Au moins pour savoir ce que ça faisait d'être le gars populaire du lycée. Ceci étant dit, ne pensez pas que je méprisais ou détestais mon petit frère, en fait, je l'adorais.

Je ne pourrais pas dire qu'il était tout pour moi, mais nous étions complices. Sans doute parce nous avions deux ans de différence, et que nos parents ayant divorcé tôt, nous avions dû nous rapprocher, et apprendre à compter l'un sur l'autre. Mon Frangin, c'était du genre à m'aider à faire des conneries gosse, il avait un cerveau extraordinaire pour élaborer des plans, sans que nos parents nous mettent la main dessus. Malgré l'écart qu'il y avait entre lui, le beau, le superbe, le magnifique Lamb, et moi, le trapu et le spécial de la portée, on s'entendait très bien. On avait des passions communes pour le jeu vidéo, et nous avions économisé ensemble pour nous en acheter une console, donc... vous l'aurez compris, le plus jeune des Lamb était la prunelle de mes yeux.
Mais je l'enviais quaaaand même un petit peu, parce que ce connard pouvait se taper toutes les filles qu'il voulait. Et pas moi.
Donc ? J'en étais où ? Ah oui, mon frère et moi venions d'une petite famille bourgeoise. La jolie maison dans le joli quartier résidentiel, où le matin, toutes les voitures sortent de beaux jardins bien entretenus dans une même danse. C'était assez fou comme ce monde était conformiste ; la scène d'introduction d'Eduard aux Mains d'Argent, quand la caméra filme le départ des familles au travail ? Tu vois le genre ? Tu le vois ? Eh bien, c'était chez moi ; ma maison aurait pu être celle du film.

On a vécu dans cette ambiance un bon moment, le salon des parents ressemblait à une photo de magazine. C'était le cas pour ma famille, tout ça, ça sentait la perfection à des kilomètres. Et moi, j'étais là, le vilain petit canard qui avait des auréoles sous les bras, et qui passait son temps à foutre du déo, en espérant passer au-dessus de l'odeur de transpiration. Cette petite vie rangée a duré jusqu'à mes huit ans, quand mes parents ont décidé de divorcer ; je crois que ma mère a trompé mon père. Une histoire classique qui brise les couples, quoi. Nous avons vécu une grande partie de notre enfance à vivre sois chez l'un, ou sois chez l'autre, toutes les deux semaines. Je devais prendre le bus pendant une heure quand je devais me rendre chez mon père, et c'est à peu près à ce moment-là que j'ai commencé à réellement apprécier mon frère. Nous étions deux mômes perdus dans le divorce des parents, on comprenait à peine pourquoi ils passaient des gens heureux ensemble, aux deux connards qui s'insultent dès qu'ils se voyaient. Ma mère était super stricte avec nous, elle l'avait toujours été, en râlant des « Lionel LAMB ne mets pas tes coudes sur la table, tu n'es pas un animal ! », ou des « LIONEL ! RETIRE CES DOIGTS DE TON NEZ ! Sinon, je te les coupe », et autres « Tu es l'aîné, mais quelle est cette blague ? Regarde ton frère, il s'habille bien, et il a de bonnes notes ». Mon père au contraire était tellement dépassé par la situation, et c'est en vivant deux semaines par mois chez lui que j'ai appris à utiliser le micro-ondes comme un dieu, en y faisant réchauffer tous les plats possibles. La pizza, le coca, et autres trucs. Oui, j'ai voulu réchauffer du coca au micro-ondes. J'ai pas toujours été une lumière.
Papa et Maman faisaient de beaux métiers, Maman était quelqu'un très dans le paraître. C'est peut-être pour ça qu'elle avait un peu de mal avec l'adolescent que j'étais, si bien qu'au fil des années, je me suis éloignée d'elle pour favoriser les rapports avec mon père, et mon frère.

Pffff...
Mais comment il fait ?
Sérieux, c'était l'anniversaire de mes dix-huit ans ; j'avais réussi à inviter Jessica à une soirée avec moi, et voilà que je la trouve en train de galocher mon frangin. Le pire, c'est que je sais qu'il ne fait pas exprès d'être beau, mais ça m'emmerde. Peut-être qu'il y avait un truc que je n'avais pas vraiment compris, quand elle m'avait demandé si je voulais danser, et comme j'ai deux pieds gauches... j'ai refusé. Non, je crois que je ne suis pas jaloux qu'il ait chopé la fille pour laquelle je croyais avoir le béguin, mais plutôt pour le fait qu'il avait toujours ce qu'il voulait.
Pffff...
Du coup, j'étais dans le fond, en train de surveiller mon petit frère échanger ses microbes avec Jessica. Je passai ma main sur ma mâchoire, un peu agacé, tandis que je le voyais poser sa main sur la cuisse de la jeune fille. Elle était bien formée Jessica, une vraie bonasse, et ça me foutait un coup au moral de le voir faire ça avec autant de facilité. Moi, je n’aurais jamais osé, mais bon. Je grommelai, et j'avalai mon verre, en me demandant si j'arriverais un jour à trouver ma place.
« Tu veux danser ? »
Je sortis de mes pensées, et en fronçant les sourcils, je posai mon regard sur mon vis-à-vis. Je la dévisageai longtemps, sans rien dire, en pesant le pour et le contre de sa proposition. Elle était jolie, quoiqu'elle avait la mâchoire un peu carrée. Elle est maquillée, un peu trop pour son âge, et surtout, elle était légèrement plus grande que moi. Je haussai les épaules, et sans un mot, je posai mon verre. Je lui pris la main, cachant mon malaise et ma timidité derrière ma nonchalance. Un joli bout de femme en devenir, mais elle n'avait pas le Bonnet E de Jessica, c'était ça le plus décevant.
« Fais pas attention. »
Me susurra-t-elle de sa très belle voix de violoncelle, mais je ne répondis pas. Trop concentré sur ce que je devais faire, parce que j'avais deux pieds gauches, et je savais pas pourquoi j'avais accepté de danser avec cette inconnue plutôt qu'avec mon plan D — D comme dans « dépucelage ». Je posai ma main sur son épaule, puis sur sa hanche, elle avait une taille de guêpe. Dommage qu'elle fut trop grande, je ne pouvais pas l'embrasser. Mon Frangin était en train de me fixer, l'air consterné, comme tous les autres ; à l'époque, je ne comprenais pas pourquoi.
« Tu t'appelles comment ? »
Ma voix était un peu trop rauque, la voix du gamin qui s'égosille sur ses jeux vidéos à longueur de journée. Elle ne répondit pas tout de suite, observant les autres qui souriaient ; à l'époque, je ne savais pas que c'était de la moquerie.
« Fredda, on va dire. »
J'ai toujours eu un certain sens de la justice, un peu comme mon petit frère ; ça fait partie des trucs en commun qu'on a. Quand nous étions plus jeunes, nous achetions ensemble des bandes dessinées, mais on aimait les trucs un peu plus bizarres que les X-Men (même si j'ai toujours adoré Wolverine), genre Spawn ou The Crow. Ouais, il adorait The Crow, ça faisait partie de ses petits délires de gothiques refoulés, soigneusement caché dans le physique du beau gosse de tête de classe. Et puis, comme je cherchais aussi à faire les pieds à ma mère, et que j'avais un oncle dans la police, bah je me suis orienté dans ce genre d'études. On n'y croyait pas, avec ma dégaine, et mes allures d'idiot qui ne sait pas mettre de chemise. C'était le frère de mon père, cet oncle, et comme ma mère trouvait que les flics faisaient de la justice bas de gamme, j'ai voulu la faire chier jusqu'au bout.
Et je pensais toujours à Fredda.

« Pfffffffff...
— Tu passes ton temps à faire ça, Lio'.
— Mais tu le vois pas toi, ce sale petit con, à me juger, là. »
J'étais assez proche de mon frère pour qu'on aille boire un verre après les cours. En fait, c'était bizarre, mais avec mes formations, et la fac, j'avais dû quitter la maison. J'avais pas envie d'y revenir, à cause de ma mère, et de ses manies à mettre des règles stupides. Mais... vivre sans mon frère, j'avais un peu de mal. Alors j'avais cette solution pour pallier à ma solitude, on se racontait nos journées, et j'essayais de draguer des filles devant son regard amusé.
Mon Fragin s'était orienté dans des études pour devenir professeur, il avait toujours eu un goût prononcé pour le partage. Déjà, enfants, c'était qui me prêtait ses jouets, tandis que moi, je me plaignais à mon père que notre mère le gâtait plus que moi. On pourrait penser que c'est une réflexion de connard égoïste, mais en réalité, c'était un peu vrai. Ma mère le préférait à moi ; une grande fatalité, en soi, mais je ne m'étais jamais senti lésé pour autant. Parce que mon frère savait partager. Oui, vous vous direz à ce moment-là que j'avais une forme d'obsession fraternelle pour lui, et c'était sans doute un peu vrai. Je débordais d'affection pour lui, et je crois que j'étais dépendant de lui ; en fait, c'était lui qui faisait plus le grand-frère que moi.
Accoudé au bar, je le fixai en train de boire sa bière, dans sa chemise et sa cravate bien lisse. Son profil noble se découpait dans la demi-obscurité de la soirée, il avait la peau un peu trop lisse, les épaules larges, et il était un peu plus grand que moi. Quand moi je portais des chemises, j'avais l'air d'un plouc, mais lui, non, loin de là. Il avala une gorgée de bière, son regard sombre était rivé sur une jolie fille qui le lui rendait par des sourires timides, et des gestes de la main, très maniérés.
« Je me fais mépriser. »
Et pourtant, mon frère était concentré sur notre conversation, il m'écoutait. Avec amusement devant toutes les conneries que je pouvais sortir en une seconde, il démêlait la vérité dans mes balbutiements nerveux. Il haussa les épaules.
« Les gens ne te connaissent pas, Lio', ils te sous-estimeront toujours. Et pourtant, t'as réussi tous les examens d'entrée, avec des notes excellentes. Tu n'as rien à prouver à personne.
— Bof. »
Tu crois peut-être que mon frère était un peu trop parfait pour être honnête ? Eh bien, je peux te dire que tu te trompes. Il était comme ça. Mes souvenirs déforment sans doute la réalité, et j'ai peut-être toujours tendance à le mettre sur un piédestal, songeant à cette époque où on défonçait des gens sur la console de jeu vidéo. La nostalgie.
« M'man m'a toujours sous-estimé, me répétant tout le temps que tu es tellement mieux que moi, c'est fatiguant de vivre dans ton ombre, tu sais. »
Mon frère plissa le front, il secoua la tête, il caressa sa mâchoire, puis il souffla :
« M'man est spécial, et il y a un tas de trucs que je ne sais pas faire que toi tu fais avec facilité. Lionel, t'as des qualités, mais t'es tellement occupé à faire le pitre que tu ne laisses personne les voir. »
Pff.
Il m'agaçait dans ces moments-là. Pourquoi ne me laissait-il pas me morfondre ? C'était plus agréable. Se répéter en boucle que j'étais un minable futur flic. Je posai mes coudes sur le comptoir, et j'y cachai ma tête, mon frère me tapota l'épaule.
« Et toi ? Tu vas comment ?
— Je m'en sors, me répondit-il. Je voudrais travailler dans les quartiers défavorisés.
— Sale bon samaritain, tu vas toujours à l'église le dimanche ? T'as sucé combien de curés pour te faire autant bénir ?
— Assez pour avoir un mal de gorge pendant dix ans. »
Je ricanai. Mon frère et moi avions pas mal de points communs, l'air de rien, l'humour en faisait partie.

J'étais nostalgique de notre enfance. En grandissant, nos routes se sont naturellement séparées. J'ai fini policier, lui, il a fini professeur. Il s'occupait d'une école d'un quartier de merde, où les élèves n'hésitaient pas à frapper les enseignants, où les concours de fierté grondaient entre les murs. Mais lui, il était patient ; je suis fier en disant que c'est grâce à moi qu'il ait obtenu cette qualité. Il faut arriver à me supporter, moi, et mes crises de nerfs, moi, et mon humour de merde. On avait gardé cette habitude de se voir toutes les semaines, en prenant des nouvelles de l'autre. Le travail à la police me vidait de mon énergie, mais je m'en sortais. Sur ça, ce connard avait encore raison, peut-être qu'au fond, j'avais les épaules pour un travail pareil. Comme lui, je n'avais pas peur de hausser le ton devant un noir de deux mètres, comme lui, je savais me faire respecter. En réalité, la différence était la manière de le faire. Lui, il privilégiait le dialogue, il donnait à ses élèves de l'importance, alors que moi, je jouais à celui qui crierait le plus fort. J'avais du coffre, et ma nonchalance m'aidait à me protéger. Les menaces de coups ? De viols ? Et autres « je vais défoncer toute ta famille avec une batte de baseball » ? J'y répondais avec ma répartie, mon côté à la fois pitre ; dans ce travail, il ne faut pas se laisser atteindre.
Il venait d'avoir ses trente ans, et moi j'étais sur le point d'avoir mes trente-deux ans. Nous étions en train de discuter dans le salon de ma mère de nos carrières. Il avait à son bras Christine, une jolie femme qu'il avait rencontrée durant ses études. Même s'il avait toujours eu du succès avec les filles, il n'avait pas eu tant de copines que ça (toujours plus que moi, ceci dit), et je sentais que Christine serait la bonne. Elle était brune, portant un carré plongeant, avec des allures de princesses. Cependant, quand elle ouvrait la bouche, elle pouvait sortir autant de vulgarités que moi ; je n'avais jamais vu ici une nana qui me ressemblait autant. Je lui souriais, tandis que je mâchais péniblement les petits amuse-gueules que ma mère avait préparés toute la journée. J'étais là, un peu perdu dans ce monde de bourgeoisie et de bon sens. J'avalai une gorgée de vin pour faire passer son truc au pâté.
« Ça se passe comment avec tes brebis égarées ?
— Lionel, tiens-toi correctement, me gronda ma mère. Nous avons une invitée, arrête de te comporter comme un ours. »
Je levai les mains en signe d'innocence, arrachant à Christine un petit rire.
« Je pense que ça va, j'ai réussi à m'imposer, et je suis en train de leur faire étudier le mouvement gothique du XIXe siècle, mais bon... j'ai un élève à problème.
— Ah ouais ? »
J'essuyai ma bouche pleine de pâté avec ma manche, tandis que mon frère m'expliquait :
« Ouais, il est plus grand que moi, ce n'est pas simple de lui faire entendre raison. J'essaye de lui faire comprendre que je peux être son ami, plus que son professeur, mais à part des remarques graveleuses, je ne tire rien de lui.
— Laisse-le tomber, lançai-je.
— Non, me coupa-t-il avec une pointe d'agacement. Je sens qu'il a du potentiel, le souci, c'est que son orthographe est une catastrophe. Même s'il arrive défoncé en cours, au moins, il y vient... qu'aux miens, mais c'est une évolution ? Je lui ai laissé mon numéro.
— Trop bon, trop con.
— Lionel ! S'exclama ma mère outrée. Ne comprends-tu pas où ton frère veut en venir ? Tout le monde n'a pas votre chance.
— Ouais ouais...
— Vincent a de l'esprit, continua-t-il en caressant sa nuque, il suffit de lui donner un petit coup de pouce. »
Je ne répondis pas.
Mon frère était tellement dans son délire de « aider son prochain », que lorsque le sale môme l'appela, parce que sa mère s'était suicidée ou un truc du genre, il quitta le repas sans hésitation. Au fond, c'était peut-être par fierté, et réellement lui prouver qu'il pouvait être là pour lui. Je le fixai en train de monter dans sa voiture, les mains dans les poches, et la clope au bec ; j'avais une mauvaise intuition. J'aurais voulu le retenir, mais finalement, je préférais ne pas louper le gâteau que ma mère avait mis une matinée à préparer.

Au fur et à mesure, Christine m'appelait pour se plaindre que son mec passait plus de temps avec ce môme qu'avec elle, quand bien même elle comprenait son élan de générosité. J'étais au téléphone avec elle, tandis qu'elle se plaignait qu'il s'était encore cassé pour aider Vincent. Je haussai les épaules, un peu ennuyé, parce que j'avais autre chose à foutre que de l'entendre se plaindre à quel point elle se sentait seule et dénigrée ; il préparait un truc pour l'anniversaire du gamin. Je tentai de couper la conversation, posant mon regard sur la jolie créature que j'avais réussis à ramener avec moi. C'était assez rare quand ça arrivait, assez en tout cas pour que je marque la date sur un calendrier, afin de me souvenir de la dernière fois que j'avais baisé. Je finis par raccrocher au nez de Christine, en ignorant ses insultes. Avec un sourire charmeur — je pouvais quelques fois bien imiter mon petit frère —, je me dirigeai vers ma future partenaire. Elle était assise dans le sofa, et mon dieu ses jambes ! Interminables, mises en valeur par des bas dont la jupe laissait entrevoir un bout de dentelle. Ouais, j'allais la baiser tellement fort, celle-là.
« Chérie, je vais te faire passer la meilleure soirée de ta vie. »
Lançai-je en commençant à défaire ma cravate. Je me dirigeai vers elle, répondant à son sourire par un autre ; elle m'était vaguement familière. Elle était brune, les cheveux bouclés, la bouche rouge et pulpeuse ; elle était à la fois vulgaire, et classe. Un peu plus grande que moi, mais avec un contact à me faire hérisser tous les poils de mon dos. Je me posai près d'elle, et sans attendre, je lui volai ses lèvres. J'avais pas baisé depuis des lustres, donc elle pouvait comprendre que j'avais les crocs, ouais, sacrément les crocs. Je soupirai contre sa peau, laissant mes propres lèvres devenir écarlates sous son maquillage, tandis qu'elle glissait ses jolies mains sur mon torse. Elle me murmura au creux de l'oreille :
« Tu te souviens pas de moi, Lionel ?
— Je devrais ? »
Demandai-je, mais avant d'obtenir une quelconque réponse, je reprenais ses lèvres. Je les mordillai, je promenai mes mains sur ses bras, et son ventre. Au fur et à mesure du baiser, je l'encourageai à se coucher sur le sofa, et finalement, n'y tenait plus, je plongeai ma main dans son décolleté. Elle gronda, en basculant la tête en arrière, puis je palpai l'objet tant désiré... sans le trouver. Ah... bah, c'était rembourré, voilà tout, ça arrive ce genre de trucs. Mais euh...
J'eus un mouvement de recul, les sourcils froncés, je pressai un peu plus la chose que j'avais entre les mains. Elle ne dit rien, un ange passa, et je serrai un peu plus ma main dessus.
Ah.
AH.
« ... Il y a erreur sur la marchandise, on dirait. »
Je retirai aussitôt ma main de son érection, en ayant l'impression de m'être sali. Je me relevai, et je reculai en regardant euh... il ? Ou elle ? Euh... la chose là, devant moi. Il ou elle poussa un soupir, et malgré moi, je frottai mes paumes sur mon pantalon.
« Ce n'est pas la peine de prendre cet air, je vais me casser. »
En fait... ce n'était pas tant que j'étais dégoûté de lui ou elle, c'était que je vivais une situation surréaliste. Ce genre de situation où tu te dis que finalement, ça ne peut arriver qu'à toi. Je secouai la tête, et je soupirai :
« Je voulais pas te vexer, hein, mais euh... disons que je m'attendais pas au bonus que tu as entre les jambes. »
Il ou elle leva les yeux au ciel, avant de se planter devant moi. Il ou elle était en train de remettre son soutien-gorge en place, puis dans un soupir :
« Je pensais que tu le savais.
— Que je savais quoi ? Que t'étais doté des mêmes attributs que moi ? Pas vraiment. »
Cependant, je comprenais pourquoi il ou elle était plus grand-e que moi.
« Je suis Fredda. »
Fredda ? Fredda ? D'où est-ce que j'avais entendu ce...
Ah.
« ... Okaaaay... la situation est super gênante. »
Fredda soupira, puis elle reprit sa veste :
« Nous avions dansé ensemble, il y a des années. Je croyais que tu avais compris à l'époque.
— Il faut croire que j'étais un peu trop con.
— Trop con ? Oui, tu l'es, et t'es sacrément vexant. Tss..
— Hé, tu vas te calmer tout de suite, toi ! M'exclamai-je en me plantant devant il ou elle, ou Truc, là, putain, c'était compliqué ! Je repris : je ne voulais pas te vexer, je ne m'attendais pas à sentir un putain de pénis en érection dans ma main. »
Pénis qui pour nous deux se transformaient en demie molle, ça coupe l'envie les travelos. Le pire, c'est que tout un tas de questions me traversait la tête : j'avais donné mon premier baiser à un mec déguisé en fille, et personne ne m'avaient prévenu à l'époque, si bien qu'on m'avait sans doute pris pour un pédé... mais est-ce que ça me rendait pédé pour autant ? Je ne savais pas. J'étais attiré par Fredda, la jolie fille rencontrée dans le bar, avec assez d'insolence et de patience pour partager un moment avec moi. MAIS PUTAIN ! J'avais touché sa queue ! Aaaaaaah !
« C'est bon, j'ai l'habitude, cracha Fredda.
— C'est quoi ton vrai prénom ? Finis-je par lui demander. »
Le travesti soupira, il mit plusieurs secondes pour répondre :
« Frederico Foster, mes amis m'appellent Freddy ou Fredda, ça dépend de mon humeur. »
Je massai mes tempes, j'étais choqué. J'avais manqué de baiser un mec. J'allai ajouter quelque chose, quand mon téléphone sonna. Comme il ou elle était vers la porte, je grondai en répondant à l'appel :
« Tu laisses ton cul ici, et ? Ouais ? C'est Lionel, quoi, Christine ? »
Freddy était devant moi, les bras croisés sous sa fausse poitrine, il me fixa longtemps, puis il comprit avant moi.
« Quoi ? »
Freddy soupira, il alla faire bouillir de l'eau, en silence. Je me laissai tomber dans le sofa. Je massai mes tempes, mes mains tremblaient, c'était la première fois que ça arrivait. Je fixai mes pieds, je pris une profonde inspiration, et je demandai :
« Comment c'est arrivé ? »
Il faisait une nuit noire. Jamais ce putain d'appartement ne m'avait semblé si sombre. Je jetai un regard à ma console de jeux vidéos, avec un pincement au coeur. Freddy me tendit un verre d'eau, je lui jetai un regard désemparé, puis j'ajoutai :
« Non, je vais m'en charger, euh... reste pas seule, je vais... prévenir M'man. »
Oh... putain.
Je raccrochai, et je balançai mon téléphone sur le sofa, il rebondit dessus. Freddy garda le silence, il me détailla. Je posai mes coudes sur mes genoux, et en joignant les mains, je fixai cette putain de console de jeux vidéos.

Merde.

 C'était étrange de retrouver son nom dans un extrait de journal, même si ce n'était pas de moi dont on parlait.
Avec un grognement de rage, je pris le journal, et je le roulai en boule avant de le viser dans la poubelle. Je ratai mon coup, mes mains n'arrêtaient pas de trembler, et je répondis au regard sévère que m'envoya une grand-mère par un doigt d'honneur, outrée, elle râla. Mais je ne l'écoutais pas, j'étais concentré sur l'immeuble en piteux état devant lequel je m'étais arrêté. Je poussai un autre soupir, et finalement, je me décidai à entrer. Nous étions le dix-sept avril.
Lentement, je grimpai les escaliers qui émettaient des grincements désagréables sous mon pas, le regard dur ; je crois que je n'ai jamais eu un tel regard. La poussière et la moisissure s'agglutinaient sur les murs, et le sol, une forte odeur d'humidité emplissait mes poumons. Ouais, je me demandai comment ce truc pouvait encore tenir debout, et quand ce n'était pas la moisissure, c'était une odeur de joint mouillée qui piquait mes narines. Je soupirai, et je pris de ma poche mes notes : le troisième étage, la porte de droite, d'accord. Je restai quelques minutes devant la porte, le paillasson était mis de travers, comme si on l'avait fait voler avant de sortir. Je frottai mes mains, puis je frappai.
BAM BAM BAM.
Plusieurs fois de suite, agacé, je frappai plus fort. Il y avait peut-être un peu trop de rage dans mon geste, mais j'avais besoin de savoir. Je ne comptais pas laisser ce gamin s'en sortir ainsi, je finis par donner un coup de poing dans la porte. Toujours pas de réponses. Finalement, agacé, je voulus défoncer la porte d'un bon coup d'épaule, mais une vieille dame noire m'arrêta :
« Vous perdez votre temps.
— Pourquoi ? C'est bien là que Vincent Weiss habite ?
— On peut dire ça. »
Je plissai les yeux, détaillant la vieille dame avec sévérité ; elle savait des choses que j'ignorais. Elle haussa les épaules, traînant son sac de courses dans les escaliers qu'elle descendait péniblement.
« Le gamin ? On l'a pas vu depuis plusieurs jours, mais ça arrive souvent, vous n'avez juste pas de chance.
— Et sa mère ? Ah mais non... sa mère s'est suicidée, c'est ça ?
— Oh... elle essaye... elle essaye, répondit-elle en se mettant à ma hauteur. Mais vous n'obtiendrez rien d'elle, c'est un déchet. Si vous voulez mon avis, le fils finira comme elle, il doit être défoncé quelque part, ou qui sait ? Mort d'une overdose. »
Je ne répondis pas à la suite, je la laissai descendre les escaliers, en silence. Tous les jours, je revins devant cette putain de porte en frappant de toutes mes forces, et jamais je n’eus de réponses. Frustré, je finis par me servir de mon boulot, je voulais voir ce gamin. Je voulais comprendre à quel point était-il impliqué dans cette histoire ; Christine s'était plainte que par sa faute, son mec l'avait encore laissé en plan pour l'aider. Et finalement, quand je baissai mes yeux sur le journal qu'on laissait traîner au travail, je lisais encore et encore la même chose :

« Hier soir, dans une rue près de l'école X, un homme âgé d'une trentaine d'années est mort.
Une bagarre aurait éclaté, et l'homme aurait été poignardé par les dealers d'un gang du quartier. On ne connait pas le mobile du meurtre.
Aucun témoin n'a été trouvé sur les lieux.
Monsieur Lamb était professeur de l'école X, célibataire, il était néanmoins reconnu pour sa générosité. Sa mort est regrettable. »

Je n'ai jamais retrouvé ce môme, et peut-être que la vieille dame noire avait raison, mort d'une overdose quelque part, sans personne pour retrouver son cadavre. Mais je n'avais pas dit mon dernier mot dans cette affaire ; quelque part ça fait cliché. J'étais l'inspecteur de police qui voulait tirer au clair la mort de son petit frère. Mais il avait laissé derrière lui un grand vide en moi, c'est à peu près à ce moment-là que j'ai commencé à déconner. J'étais obnibulé par sa mort, je passais mes nuits à songer que j'aurais dû écouter mon instinct, et l'empêcher de vouloir prendre soin de ce môme. Mon intuition me disait qu'il était responsable de sa mort, peut-être était-il celui qui l'avait buté. Tout ça sonnait comme un vieux scénario de film noir, j'avais avec moi ma bouteille de Gin, et mes vieux démons. Je ne vivais que pour faire éclater la vérité, et vous savez quoi ? C'est Frederico Foster qui m'a aidé.
Je serais toujours étonné à quel point ce dernier pouvait être utile. Freddy était un électron libre, coincé entre deux genres, mais qui avait assez de finesse pour comprendre ce que moi, je n'arrivais pas à saisir. Il était mêlé à des milieux un peu sombres, et il m'aida ans mon enquête. Je ne retrouvais jamais Vincent Weiss, mais le sale connard qui avait poignardé mon frère. J'étais tellement obsédé dans ma vengeance que mon travail me servit d'excuses. Un noir. Je ne suis pas étonné.
« T'es sûr de toi, Lionel ? C'est comme ça que tu vas finir cette histoire ?
— Ouais. »
Freddy était derrière moi, je détestais quand il portait des talons, c'était troublant comment ce mec pouvait à la fois être viril, et féminin ; tout ça paraissait dépendre de son humeur. Je coinçai la cigarette entre mes dents, et je soupirai :
« Si tu savais toutes les bavures que j'ai déjà dû cacher de mes collègues, la mienne passera inaperçue.
— Je ne crois pas, là, tu en fais une affaire personnelle.
— Qu'importe, je m'en fous, j'en ai besoin.
— Le vengeance ne mène à rien, soupira Freddy en s'allumant à son tour une cigarette.
— Je sais... mais... »
Je ne savais pas quoi répondre, je n'aimais pas argumenter.
J'étais fatigué.
M'man pensait que je n'avais pas la moindre émotion, et que la mort de mon petit frère ne m'avait pas atteinte. Elle se trompait à un point inimaginable. Sa mort m'avait profondément choqué, il avait toujours été pour moi quelque chose au-dessus de tout, une entité supérieure, un guide et un ami. Quand je voyais Christine, quand je la voyais pleurer sans s'arrêter, elle d'habitude si forte, avec sa dégaine et ses remarques cinglantes, ça me foutait une énorme boule au ventre. La haine. Je bouillais de haine, j'en pouvais plus. La fatigue rendait ma vision floue, la fumée de cigarette me séparait de ma cible, et de moi. Il était là, celui qui lui avait donné ce putain de coup de couteau dans le ventre. Je le voyais, persuadé d'échapper à la justice, rigolant avec ses potes, fumant son joint au coin de la ruelle.
« Ce ne sont que des gamins, les mêmes gamins que ton frère voulait sauver.
— Il leur a tout donné, Freddy, son temps, son âme, sa vie. Je ne peux pas pardonner ça. »
La dernière chose à faire, c'était de s'attaquer ce à quoi je tenais le plus au monde. Mon petit frère. Mon frangin, le mec avec qui passé trente ans, je pouvais toujours jouer à la console, comme si nous en avions dix et douze. Je soupirai, étrangement calme. À force de me rapprocher, comme un lion vers sa proie, je me fis remarquer par les sales chiens nègres qui avaient tué mon frère.
MON FRÈRE.
« Tu veux quoi, toi ?
— Moi ? »
Je haussai les épaules, ce n'était pas quatre gamins défoncés qui allaient me faire peur.
« Ouais, toi. »
Freddy ne bougeait pas, il semblait intrigué par la situation, mais il avait le bon sens de ne pas venir m'ennuyer. J'ai des idées arrêtées, je suis borné, je pourrais sauter dans le vide, si c'est ce que j'ai en tête. Ce petit regard insolent, noirs, avec un sourire aux dents éclatant, l'air de dire : « je sais qui tu es, et tu m'amuses, sale blanc », ça m'irrita profondément. Avant même que je m'en aperçoive, j'avais sorti mon pistolet de service, et j'avais tiré en plein milieu de son front.
Et enfin, mes mains avaient arrêté de trembler.

Mon petit frère était mort.

Contrairement à ce que j'avais cru, ma bavure n'en resta pas là. D'un côté, ça aurait pu être pire que ce que je pensais, parce que j'avais tué un noir. Un noir, ça manque à personne, c'est facile à descendre, mais d'un autre côté, on me traita de raciste à tout va. Il aurait été blanc, j'aurais agis de la même manière, mais personne ne comprenait ça. Je fus accusé d'un crime raciste, sous couvert de la police. Mon erreur avait été de ne pas l'arrêter, et de le descendre. Pourquoi l'arrêter ? Pour qu'il aille en taule ? La taule ne l'aurait pas changé, je connais ce genre d'énergumènes. J'avais agi sur un coup de tête, et mon erreur me valut une suspension de plusieurs mois. Je n'avais pas été le plus brillant des éléments, et si certains comprenaient mon geste au sein de la police, la plupart se contentaient de me mépriser.
J'étais redevenu le vilain petit canard, mais j'assistais à tout cela avec lassitude. Mon frère était mort, je l'avais vengé, et c'était tout ce qui importait. Malgré tout, je n'arrivais pas à pleurer ; cette émotion était bloquée en moi. Je n'avais pas espéré le faire revenir d'entre les morts, non, j'avais espéré que mon meurtre ravive quelque chose en moi. Et finalement, seul le temps arriva à me sortir de cet état. Les mois de ma suspension furent les plus rudes, comme je n'avais rien à faire de mes journées, je passais mon temps à boire, et à regarder la télévision. Je déchirais les journaux, je coupais les infos, et finalement, j'arrêtais le visionnage de mon lynchage public pour jouer à la console. Qu'ils me crachent dessus, qu'ils me jugent, ce ne serait pas la première fois. Finalement, ma vengeance m'avait fait sortir de l'ombre de mon frère.

Il est quelle heure ? Je ne sais plus.
Mon portable n'arrête pas de sonner, ça doit être le douzième message que Christine me laisse, elle est lourde.
Sur le ventre, les yeux cernés, je regarde le rayon de soleil passer à travers les rideaux. J'ai mal au crâne, la bouche pâteuse, et les membres lourds. Quelque part, ma chute m'indiffère totalement.
Pfffffffff...
Mon portable arrête enfin de sonner, et lentement, je m'extirpe du lit. Je pue la sueur, l'alcool, et le renfermé, ça fait trois semaines que je ne suis pas sorti. Je me nourris de pizzas ou de nouilles chinoises, les emballages jonchent le sol, un vrai raz-de-marée de cartons de pizzas et de boîtes de nouilles à peine entamées. Finalement, on frappe à la porte, je grogne, et péniblement, je m'y dirige. Je l'ouvre, et je tombe nez à nez devant Christine ; je suis pas rasé, j'ai les cheveux gras, et l'air patibulaire.
« Pourquoi tu ne réponds pas ?
— Parce que... euh... pfffffff. »
Christine lève les yeux au ciel, elle me pousse, et rentre dans l'appartement.
C'est bizarre, mais je l'ai épousé un an après la mort de mon frère.

Je ne saurais pas quoi te dire, je ne sais pas exactement ce qui nous a rapprochés. Ouais, la mort de Mon Frangin, certainement. Christine m'a forcé à remonter la pente, elle était aidée par Frederico Foster, qui lorsque je refusais de sortir, préférant fumer et boire, venait me tirer par les cheveux, et jeter dehors. Pendant un an, j'ai été soutenu, pendant un an, tous les deux cachaient mes bouteilles de gnôle pour m'obliger à arrêter de boire. Quelques fois, je pensais au suicide ; je n'avais plus réellement de raison de vivre, ni de sourire. Parfois, j'avais l'impression que nous formions un couple à trois, un homme, une femme, et une chose entre deux genres, toujours indécise sur le sexe qu'elle devait prendre. Non, je n'ai jamais couché avec Frederico, mais il continuait de me déstabiliser à ce niveau-là. La première fois que j'ai couché avec Christine, c'était à Fredda que je pensais. Et ça m'avait fait assez bander pour commencer un second round.
Je repris le travail, et j'ai dû refaire mes preuves, prouver que j'étais plus qu'un alcoolique. J'ai saigné, tous les jours étaient une guerre pour montrer que j'avais des tripes, et que plus jamais, je ne descendrais un criminel de sang-froid. Pourtant, Dieu seul sait à quel point ce travail encourage ce genre de comportements. J'ai dû apprendre à fermer ma grande gueule, à me baisser devant mes supérieurs, afin de mettre en avant ma bonne foi de « changer ». C'était tellement pénible pour moi que je rentrais abattu chez moi, rejoignant ma femme, en songeant que me tirer une balle aurait été plus simple. Mais j'ai encaissé. C'était pour Lui, que je faisais ça, que je continuais ce travail de chien, quitte à me faire traiter de sale con. Parce que je ne voulais plus de victimes telles que mon frère, parce que si j'avais été intelligent, je lui aurais dit de s'éloigner de ce môme.

Parce que je n'avais pas su le protéger.
J'avais échoué.

Tu sais pourquoi j'ai voulu entrer dans la police ? Pour faire chier ma mère ? Ouais, mais pas que. J'avais une vraie raison derrière ça, soigneusement caché dans mon gras, et mes pitreries. Tu crois que j'ai aimé mon petit frère au premier regard ? Non, avant le divorce, je ne supportais pas sa présence. Il avait toute l'attention des parents, et moi, quand je faisais quelque chose de bien, c'était considéré comme la normalité. Lui, il s'accrochait à moi, en cherchant à avoir mon attention. Il était tellement collant que plusieurs fois, je rêvais de le balancer en haut du toit de la maison, afin de m'en débarrasser. Mais quelque chose a changé ça, c'était avant le divorce. Il était tellement gentil, ce gamin, qu'il voulait devenir ami avec tout le monde, et que malgré tout ce que les autres enfants disaient de moi, il prenait toujours ma défense.
« Lionel, il regarde le zizi des autres garçons ! »
Ce genre de conneries. Bah, mon frère en voulant me défendre s'est attaqué à un gros morceau. Une vraie teigne, qui crachait dans mon dos ces conneries en boucle. Il l'a poussé, l'autre s'est retourné, et avant même que je comprenne, je l'ai trouvé en train de frapper mon petit frère avec son poing. Il était énorme, un vrai taureau suant sous le soleil d'Avril. Et bizarrement, voir mon petit-frère se faire tabasser, parce qu'il était trop attaché à moi, ça m'a retourné l'estomac. J'ai sauté sur ce gamin, je lui ai déchiré une partie de l'oreille.
Depuis ce jour, je m'étais promis de le protéger.
Et ce 14 Avril, il s'était fait poignarder. Sans doute en voulant protéger Weiss.
Parce qu'il était ainsi.

« Lionel, et si on faisait un enfant ?
— Non. »
Christine poussa un soupir, elle embrassa ma joue, mais elle garda le silence. C'était la première fois que j'étais réellement en couple avec une nana, et j'avais du mal avec un certain nombre de choses : le fait de devoir enlever mes chaussettes pendant l'amour, parce que Madame trouvait que c'était un tue-l'amour, baisser la lunette des chiottes, ne pas demander si je pouvais prendre la dernière part du gâteau, parce que même si elle ne la mangeait pas, il fallait que je pense à l'éventualité qu'elle puisse la vouloir, acheter des tampons et des serviettes hygiéniques, et...
« Lionel, et si on faisait un enfant ?
— Non. »
Et ça. Un môme. Christine voulait un môme. Mais qu'est-ce que j'allais faire d'un môme ? Je n'étais même pas capable de manger proprement, j'allais faire quoi avec ça ? Je n'aime pas les enfants, ça me regarde bizarrement, et le peu que j'ai pu approcher, ça me tirait la barbe de toutes leurs en forces en gazouillant. C'est moche un bébé, et ça allait m'empêcher de baiser pendant un moment. Pourtant, je sais qu'un bébé aurait pu sauver mon couple, parce qu'il commençait à battre de l'aile, sérieusement. Je n'étais pas assez doué, je n'étais pas comme mon frère, et je crois que c'est ce qui a fait déprimer Christine.

Je n'étais pas lui.
Mais... elle ne m'a pas quitté à cause de mon refus de faire des gosses. Non. Elle m'a quitté à cause d'un enculé en costard, aux cheveux gominés, et aux dents blanches. P'tain, moi, je frotte tous les jours avec le truc d'Email Diamant, j'ai jamais les dents aussi blanches !

Tu te souviens de ce que je t'ai expliqué, avec mon instinct ? Il y a des gens, ils pourront faire ce qu'ils peuvent, ça ne passera jamais avec moi. Parce que je les sens. Et c'est à peu près ce qu'il s'est passé avec ce sale type. Dès le premier regard que j'ai posé sur lui, j'ai su qu'il n'était pas honnête. Tout a commencé un après-midi pluvieux, lorsqu'on a voulu porter plainte contre lui ; un nom pareil, Campbell, ça ne passe pas inaperçu dans une plainte. C'était un grand ponte de l'immobilier, un homme respecté par tous, invité dans tous les galas de charités possibles ; un bon samaritain. Le genre d'homme que mon frère se destinait à un être. Je disais ? Ah oui. Il pleuvait, il pleuvait tellement fort que je n'arrivais plus à m'entendre penser, tandis que la pluie tambourinait contre les vitres de mon bureau. Mon regard était posé sur la jeune femme qui venait porter plainte, et qui avec prudence avançait des arguments. Elle faisait partie de l'association caritative de Campbell, un joli bout de femme, mais avec les yeux rouges, un peu stupides. Tu sais quoi ? C'est moi qui avais pris sa déposition, je me souviens très bien, mais surtout... ce qui me resta en travers de la gorge, ce fut lorsqu'un de mes collègues balança :
« Ah... Madame A. a retiré sa plainte contre Campbell. »
Et la police ne s'est bizarrement jamais posé la question du pourquoi. Je ne sais pas ce qu'il s'est passé dans ma tête à ce moment-là, mais j'ai ouvert une page internet. Campbell, je savais plus ou moins ce que c'était, sans mettre le doigt dessus. J'ai fouillé internet jusqu'à tomber sur une photo de Lui.

Mon combat de cinq longues années.

La photo le présentait en plein gala de charité, un bon verre à la main ; le visage lisse, fermé de toutes expressions. Il était habillé de costumes gris clair, mettant en valeur ses traits tranquilles de parvenu. Ouais. J'ai vu ce mec en photo, et quelque chose m'a soufflé à l'oreille qu'il était bien trop propre sur lui pour être honnête. Il avait cette micro-expression dans les yeux, très légèrement plissée à leurs coins, qui transpiraient de suffisance ; c'était peut-être ça qui m'avait mis la puce à l'oreille. Ou peut-être parce qu'il avait les cheveux trop gominés, qu'il était... mon exact opposé, et qu'il faisait partie des hommes que ma mère aurait adoré que je devienne. J'avais parfois des comportements d'animal, notamment dans ma façon de vivre ; j'étais un vieil ours un peu rustre, qui peinait à accepter la présence de la femme de son frère.
Ambroise Campbell, un nom que je n'oublierais jamais
Non mais... Ambroise, c'est un peu la honte de se nommer ainsi, ça fait vieux prénom moyenâgeux. Berk. Berk.

Pour l'attraper, j'ai tout mis en oeuvre, j'ai donné toute mon énergie pendant cinq ans, sans jamais trouver le moindre indice. Madame A qui avait déposé sa plainte contre Campbell refusa de me contacter, elle avait changé d'adresse et d'état ; elle était devenue un élément faux de mon enquête. J'étais tellement obsédé par Campbell que ça s'est ressenti dans mon couple, je délaissai la femme de mon frère, je rentrais tous les jours de plus en plus tard, de plus en plus énervé et fatigué. Si Christine me parlait, je répondais en hurlant, puis je m'enfermais dans la chambre. J'éparpillai alors sur le lit toutes les informations que j'avais, j'embaumais la pièce de cigarettes, et de Whisky. J'ai replongé plus ou moins dedans durant cette période, parce que je n'avais personne à qui confier ce qu'il se passait. Christine me grondait, elle pleurait, et je l'ai fait chuter avec moi. Plus le temps passa, moins elle n'aborda avec moi son envie de faire un enfant.
Quatre ans et demi, et toujours rien. Le truc, c'était que j'étais tellement enfoncé dans mon obsession que ma carrière en prenait un coup ; je dormais peu, je faisais de plus en plus de bavures, et je fus mise à pied parce que j'avais frappé un témoin dans une autre enquête. Un psy de l'époque balança que je faisais une forme de burn-out, et que je devais prendre du temps pour me reconstruire. Non ! Ce n'était pas ça, le pire, c'était d'entendre tous les jours :
« Inspecteur Lamb, vous vous trompez, Monsieur Campbell est une personne respectable, cela peut exister, les gens bien, vous savez. »
Alors que je savais que c'était. Cette micro-expression de suffisance dans le coin de ses yeux, ça me hurlait la vérité, ce connard n'était pas honnête. Putain, ça se voyait sur sa gueule ? Pourquoi personne ne me croyait ? Parce que je n'étais pas aussi brillant que ce connard d'Aiden Vincentini, qui à peine sortit de sa fac faisait preuve d'un esprit plus brillant que le mien ? Parce que je jalousais sois disant Campbell de tout ce qu'il avait ? Non ! Je ne me trompais pas ! Je ne me trompais jamais ! Mon instinct était la seule chose de fiable !
Quatre ans et demi d'enquête, une mise à pied pour burn out, et toujours rien.

Et... la pire des nouvelles me tomba dessus.

J'étais devant Christine, ma cravate à peine faîte, ma chemise boutonnée en désordre. J'avais les cheveux en bataille, gras, une barbe de plusieurs jours, pleins de miettes. Je puais la bière, je puais la sueur, et mes yeux sombres n'avaient plus cette lueur enfantine qui était... tellement moi. Elle me fixa, les années avaient laissé sur son visage quelque chose de très différent de ce à quoi je m'attendais. J'avais face à moi une femme brisée, brune, un peu ronde, qui n'en pouvait plus de son mari. Elle soupira.
J'étais devant mon sofa, l'appartement empestait l'ours et les ordures ; en fait, depuis plusieurs mois, Christine ne rentrait plus à la maison. Elle me laissait m'enfoncer, sans intervenir, comme Frederico Foster qui s'était probablement lassé de moi. Comme tout le monde. Comme mon frère. Je serrais lâchement les poings, la respiration fébrile, je lui demandai :
« Tu peux répéter ? »
La voix collante, enrouée, la poitrine gonflée de douleur. Elle jeta plusieurs coups d'oeil autour d'elle, et je prenais doucement conscience que j'étais incapable de prendre soin de quelqu'un. Même pas de moi. Alors rendre heureuse cette femme, essayer du moins, avait été la plus grosse de mes conneries. Elle prit une profonde inspiration, son maquillage coulait derrière ses larmes, et elle soupira :
« Je suis enceinte. »
Mais ça faisait deux ans, voir plus, que nous ne faisions plus l'amour. J'avais jamais réussi à la faire jouir, à part par accident une fois ; je n'étais pas assez doué. Quand la nouvelle chemina dans mon cerveau, je me sentis faible. Brusquement. Je haussai les épaules, je me retournai en prétextant que j'avais peut-être une piste pour Ambroise Campbell, préférant nier la vérité. Mais la vérité était plus difficile que je ne l'avais cru, car déjà, Christine m'avança :
« De lui.
— Qui ça ? De lui ? »
Ambroise Campbell.
Parce qu'en plus de détruire ma vie, il avait foutu mon épouse enceinte. Je ne sus pas exactement ce qu'il s'est passé entre eux, peut-être que tout ça n'était qu'un complot de Campbell visant à me faire perdre pied, parce que je fouinais trop. Dans tous les cas, j'ai perdu la tête. Je ne me souviens plus trop, je ne sais plus si c'était à cause de l'alcool, ou si j'avais été parfaitement conscient de ce que j'étais en train de faire. Je levai ma main sur Christine, et je la frappai dans un hurlement de rage :
« TU N'ES QU'UNE SALOPE ! »
Mon poing s'enfonça dans sa mâchoire, elle tomba en arrière sous le choc. Elle releva ses yeux sur moi, de surprise, mais elle n'eut pas le temps que de nouveau, j'armai mon poing pour la frapper. Putain ! La salope ! Elle m'avait trompé ! Mais elle m'avait trompé avec cet enculé, et il lui avait fait un gosse ! Elle poussa plusieurs cris de désespoir, mon poing la frappait, encore et encore. Putain ! Je voulais démolir son visage, je voulais écraser mes phalanges dans cette expression suffisante, lui arracher les yeux. Et à chaque fois que je les fermais, je repensais à Campbell, c'était lui que je voulais détruire. Pour toujours. Et ma main heurtait son visage. Au bout d'un moment, j'eus tellement mal dans mon poing que je m'arrêtai.
Christine était à mes pieds, la face en sang, elle releva sur moi ses yeux pleins de larmes.
« Tu n'es rien, Lionel, rien, tu ne seras jamais lui ! »
Elle se leva péniblement, puis elle s'en alla sans rien dire.

Quel minable.
Je retombai, assis sur le sofa, fixant le sol, incertain. Maintenant qu'elle s'était enfuie, je comprenais un peu mieux la connerie que je venais de faire.
Pour cet homme, j'avais foutu ma carrière en l'air.
Pour cet homme, j'avais tué mon couple.
J'étais le pire des cons, j'étais incapable de protéger qui que ce soit. Je ne serais jamais lui, qu'avait-elle espéré en se mariant avec moi ? Mon petit frère me manquait, terriblement. Au bout de douze ans, porter son deuil était toujours aussi lourd. Il l'était davantage maintenant. Je n'avais personne autour de moi.
Alors je m'allumai une cigarette, je respirai le parfum, puis je pris mon pistolet.
Pendant un moment, il resta pointé sur ma tempe. Ma clope se consumait, la fumée s'élevait autour de moi. Putain, j'avais frappé la copine de mon frère. Je ne méritais pas de vivre.
J'inspirai une dernière bouffée de clope, les poumons imbibés, et j'enlevai la sécurité.
Je fermai les yeux, le front plissé, je n'arrivais toujours pas à pleurer.
Un grincement de porte, des talons claquant sur le plancher, voilà ce qui m'arrêta. Je rouvris lentement les yeux, l'arme toujours collée à ma tempe, la clope sur le point de tomber sur ma bouche.
Freddy était là, dans un long manteau, les cheveux bouclés. Il avait un sac de cuir et de marque sur son épaule, la main plongée dedans. J'aime à penser qu'il était venu me tuer. Mais...
« Ce n'était pas fermé. »
Me dit-il de sa voix de violoncelle, dardant sur moi ses yeux sombres : il lisait en moi, comme dans un livre ouvert. Je ne répondis pas. Tranquille, Freddy avança vers moi, il posa sa main sur la mienne, et il éloigna l'arme de ma tempe. Je ne dis rien, je le laissai faire, fragile, vulnérable. Il passa son bras par-dessus son épaule, il fit tomber le pistolet au sol, puis il prit ma tête contre sa poitrine. C'était rembourré, toujours. Il caressa mes cheveux, avant de lentement s'allonger avec moi sur le canapé, la respiration calme, quoique son coeur battait un peu trop fort contre mon oreille. Je ne dis rien, il ne dit rien. Nous restions ainsi un bon bout de temps, jusqu'à ce que la clope se termine.
« J'ai frappé la femme de mon frère, putain quel minable. »
Fis-je au bout d'un moment, la voix enrouée, sans arriver à pleurer. Freddy inspira, il ne commenta pas, il se contenta d'un baiser sur ma tempe.
« ... Elle a raison, j'en fais mon obsession. Qu'est-ce qui ne va pas avec moi, putain ? Pourquoi faut toujours que je fasse tout de travers ? »
Freddy ne répondit pas tout de suite, il ferma les yeux, et je savourais sa chaleur sur ce sofa. Mon poids sur lui, je soupirai, puis il dit :
« Ce n'est pas vraiment ça, tu ne vois pas le problème, Lionel ? “La femme de mon frère”, tu l'as épousé, mais elle restera “la femme de ton frère”.
— J'suis le pire des idiots, putain... j'aurais dû fermer ma gueule, elle a raison...
— Non... me coupa Freddy en me regardant. Tu es franc, tu n'as pas peur de dire ce que tu penses et comment tu le penses, sans détour, tu es sincère, quoique borné... mais... d'un autre côté, tu vois les gens tels qu'ils sont, Lionel. Tu vois à travers eux en dépit de tout ce qu'ils cachent, c'est peut-être pour ça que tu m'as pris pour une femme, parce que je me sens femme. C'est pour ça que tu es persuadé que Campbell est la pire des enflures, parce que tu vois au-delà de son hypocrisie. »
Je ne savais pas quoi dire devant une telle déclaration, et Freddy enchaîna :
« Je vais t'aider. »
Je me redressai, je l'observai, et les sourcils froncés, je lui demandai :
« Pourquoi es-tu toujours là dans les pires moments à me soutenir, hein ? »
Freddy ne répondit pas. Il se contenta de sourire.

Le fin mot de l'histoire ? Eh bien...
Dans le journal, il y avait une photo de ma grosse tête d'abruti, à la une ; je faisais enfin les gros titres pour une raison valable. L'inspecteur Lamb avait mis la main sur un témoin, qui avait tout avoué ; un collaborateur de Campbell, qui plusieurs semaines après la visite de Freddy chez moi, était venu se dénoncer. Je ne sais pas exactement ce que Freddy lui a fait, mais au moins, je pouvais reprendre une carrière normale. On prit enfin mes dossiers au sérieux, on me chargea de l'enquête.
Ouais, maintenant, j'avais ma tête d'abruti sur la une des journaux. Pff... genre, c'était quoi toute cette hypocrisie mielleuse ?
Tu sais ce que j'ai fait, quand j'ai vu Campbell se faire embarquer par mes collègues pour un aller simple en prison ?
J'étais dehors, en train de fumer, il faisait gris, et la pluie dégoulinait sur mes épaules. Les flics encadraient Campbell, et lui faisait baisser la tête pour le tenir loin des médias.
Enfin, mon regard croisa le sien.
Un fin sourire orna mon visage de crétin, et lentement, je décollai ma clope de ma bouche. Qu'il se souvienne de ce sourire victorieux pour toujours, que ce connard comprenne à quel point j'avais gagné. Avant qu'il ne rentre complètement dans le véhicule, je levai lentement mon majeur en le fixant.
Parce que tu sais quoi ? J'adore avoir le dernier mot dans une histoire. Et ce doigt, tendu vers sa face trop lisse, c'était ma façon de lui dire adieu. Un peu comme j'avais dis adieu à mon frère, en éteigant pour toujours la console de jeux vidéos que nous avions achetés tous les deux, durant notre enfance.




Côté joueur


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Aaron Harrington
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Taille: 1.85 mètres
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Aaron Harrington
Maître chien
Lun 7 Nov 2016 - 23:58

Tu es validé !

Espèce d'Inspecteur Crétin. Pfff bon tu sais déjà que j'adore ENCORE ce personnage hein. Pfffffffff voila zut. Crotte. Brfrkqlfjqsdglsk. Voilà ton commentaire. C'tout. \o/ e_e \o/
Félicitations tu es à présent validé, tu peux librement poster tes rps. Pour ton information, n'oublie pas d'aller recenser ton avatar, tu peux aussi aller créer ta fiche de liens.

Une rumeur te sera bientôt délivrée !
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Lionel Lamb
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